Le 16 octobre 2015, une inspectrice du travail de Haute-Savoie, Laura Pfeiffer, est citée à comparaître devant le tribunal correctionnel d’Annecy. Elle comparaîtra en tant que prévenue pour recel (passible de 5 ans d’emprisonnement et de 375000 euros d’amende) et violation du secret professionnel (un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende) à la suite d’une plainte déposée par l’entreprise TEFAL.
Son crime ? Avoir dénoncé, en 2013, les pressions extérieures et les tentatives de déstabilisation de la part de l’entreprise Tefal (dont elle assurait le contrôle).
A l’époque, l’entreprise Tefal est mécontente de l’action de l’inspectrice du travail, qui remet en cause la légalité de l’accord des 35h. Via le Medef local et le responsable hiérarchique de l’inspectrice du travail, elle tente de faire renoncer Laura Pfeiffer et de lui retirer le contrôle de cette entreprise. Contact est même pris avec les renseignements généraux pour surveiller son comportement…
Sauf que l’inspectrice du travail finit par avoir communication de documents démontrant ces collusions, grâce à un salarié de l’entreprise, et qu’elle les communique aux syndicats du ministère du travail pour se défendre, sa hiérarchie ne la soutenant pas.
C’est la possession de ces documents et leur communication aux syndicats qui est aujourd’hui reprochée à Laura Pfeiffer et au salarié, qui est lui aussi poursuivi pour les mêmes chefs d’inculpation.
Autrement dit, Tefal s’acharne sur une inspectrice qui n’a fait que son travail et qui a dénoncé les pressions et les manoeuvres à son encontre. Et l’entreprise cherche à faire taire par avance tous les salariés qui pourraient dénoncer les malversations de leurs employeurs… Dans le même temps, Tefal, qui devrait être poursuivie pour délit d’obstacle à l’encontre d’une inspectrice du travail, n’est pas inquiété…
L’Union syndicale Solidaires dénonce cette justice aux ordres qui prétend « faire le ménage » à l’inspection du travail (cf. les déclarations du Procureur dans l’Humanité du 21 mai 2015) plutôt que de s’attaquer à la délinquance patronale.
Nous rappelons que l’article 6 de la Convention 81 de l’OIT prévoit que les inspecteurs et inspectrices du travail doivent avoir un statut et des conditions de service qui « leur assurent la stabilité dans leur emploi et les rendent indépendants de tout changement de gouvernement et de toute influence extérieure indue ». Le Conseil national de l’Inspection du travail (CNIT), instance déontologique de la profession, a d’ailleurs reconnu en 2014 l’atteinte à ce principe : « tant l’entreprise que l’organisation patronale qu’elle a sollicitée ont cherché à porter atteinte à ces exigences en tentant d’obtenir de l’administration (préfet) et du responsable hiérarchique le changement d’affectation de l’inspectrice et par là-même la cessation de l’action de contrôle à l’égard de l’entreprise ».
C’est ce principe qui est aujourd’hui outrageusement bafoué, avec des conséquences sur la santé de l’inspectrice du travail et sur l’ensemble de ce corps de contrôle de défense des droits des salariés.
L’union syndicale Solidaires demande l’abandon immédiat des poursuites contre Laura Pfeiffer et le salarié lanceur d’alerte, la condamnation publique par Myriam El Khomri, Ministre du travail, des agissements de Tefal et appelle à participer massivement au rassemblement de soutien du 16 octobre 2015 devant le tribunal correctionnel d’Annecy.
Paris 7 octobre 201