Le nouveau chemin d’Emmanuel Macron ne l’est qu’en apparence. Il s’agit essentiellement de poursuivre une politique patronale et antisociale dans la ligne de son gouvernement de droite assumée. Déclinée ensuite par Jean Castex dans son discours de politique générale, cette politique habillée du vocable de la modernité rappelle furieusement l’ancien monde, sa violence antisociale et son inefficacité. Prime à l’emploi des jeunes, multiplication des services civiques et contrats d’insertion (toujours la précarité), poursuite des exonérations de cotisations patronales (toujours les mêmes qui paieront moins), les mesures promises ne seront bien évidemment pas à la hauteur de la catastrophe sociale annoncée. Tout juste avons-nous eu droit à un couplet sur les entreprises invitées à la “stricte modération dans la distribution des dividendes”. Sans contrainte ni taxation... L’emploi, c’est être davantage à travailler, pas travailler davantage ! Certes un plan de relance de 100 milliards pour une économie plus verte est annoncé. Rénovation thermique des logements, mesures contre l’artificialisation des sols, promotion des productions agricoles de qualité et des circuits courts… Un véritable catalogue de mesures écologiques a été énoncé qui pourrait aller dans le bon sens ; toutefois comment croire que l’écologie et le localisme revendiqués résisteront aux contradictions de Macron et de son monde qui n’entendent pas remettre en cause les dogmes de la croissance et du libre-échange mais cherchent à satisfaire un patronat rétif à toute écologie et une finance qui ne connaît que la rentabilité ?
Et pour le reste, notamment du côté des amortisseurs sociaux, des services publics ou de la protection sociale, ce sera comme prévu la soupe à la grimace. Aux côtés d’un Ségur de la santé cosmétique au regard des besoins colossaux du secteur de la santé et qui donc ne résoudra rien aux problèmes structurels de l’hôpital, les services publics seront sommés de faire des économies sur le fonctionnement et de toujours plus se simplifier, dématérialiser, se transformer et donc se saborder. Quant à l’assurance chômage et sa réforme de 2019, elle sera simplement différée et aménagée à la marge, provoquant la misère de centaines de milliers de chômeurs-euses, comme toujours accusé-es d’être responsables de leur sort. Et malgré l’opposition unanime des organisations syndicales y compris patronales, la réforme des retraites sera menée et les régimes spéciaux supprimés : elle est le marqueur de ce quinquennat et ses ratés de 2019 ne sauraient empêcher Jupiter de livrer les retraites aux appétits de la finance. Tout cela dans le cadre du “dialogue social” ressassé à presque chaque ligne.
Ajouté à cela un discours particulièrement autoritariste et sécuritaire qui désigne l’”islamisme radical” et la petite incivilité comme l’ennemi mais également les “groupes violents” venant perturber les manifestations sociales, Castex se range sans surprise aux côtés des forces de police auquel il a apporté un soutien indéfectible pour maintenir l’ordre social. Malgré le fait qu’il prétende vouloir combattre le racisme avec “la dernière énergie”, le monde d’après façon Macron et Castex est indiscutablement d’essence conservatrice, c’est donc bien le monde d’avant-hier. Les nominations de Darmanin accusé de viol et Dupont Moretti sexiste et anti-féministe, à l’intérieur et à la justice, sont la preuve flagrante d’un décalage total avec les luttes et les combats féministes contre un système patriarcal archaïque.
Comme les milliers de manifestant-es venu-es le 14 juillet partout en France crier leur rejet des politiques antisociales et inégalitaires, mais également aux côtés des luttes menées dans les entreprises contre les suppressions d’emplois et pour un autre partage des richesses, il existe une alternative : c’est la lutte pour un monde d’égalité, de partage du temps de travail et de justice sociale et écologique.
La construction du rapport de force dans le monde du travail et dans la rue est donc pour Solidaires le chemin tracé. Ni nouveau ni ancien, comme toujours juste indispensable.
Paris, le 15 juillet 2020