Les attaques sur le secteur associatif ont été multipliées dès le début des années 2000. En ligne de mire la mise au pas du secteur associatif par une dépendance économique qui ne permet pas aux associations de jouer leur rôle politique.
Le gouvernement d'Emmanuel Macron va plus loin en promulguant une loi raciste et islamophobe appelée loi "confortant les principes républicains". Cette loi piétine les lois 1901 sur la liberté d'association et dévoie la loi de 1905 sur la laïcité.
Les dissolutions d'associations en chaine, dont celle du CCIF, acteur reconnu de la lutte contre l'islamophobie sont extrêmement préoccupantes et sont une menace pour nous tou-te-s.
C'est pourquoi la commission antiracisme d'ASSO-Solidaires a réuni le 20 juin 2022 celles et ceux qui agissent contre cette loi.
Un résumé en dessins de cette soirée :
Réécouter la soirée
Vous pouvez réécouter l'audio de la soirée !
Pour toute question ou souhait d'échange suite à cette soirée, n'hésitez pas à contacter le groupe de travail Antiracisme du syndicat Asso-Solidaires : antiracisme@syndicat-asso.fr
Suite à des soucis techniques, les 12 premières minutes de la table ronde sont inaudibles. Nous les avons retranscrites ci-dessous :
Introduction par Houda Asal – syndicat ASSO-Solidaires
Tout d’abord, merci à la Flèche d’Or de nous accueillir. Bienvenue à cette soirée organisée par le syndicat ASSO- Solidaires, qui est un syndicat de travailleur-ses du secteur associatif : De salarié-es, mais aussi de volontaires en service civique, de stagiaires et de tous les précaires qui travaillent dans ce secteur. On est affilié à l'Union syndicale Solidaires, qui est un syndicat de lutte et de transformation sociale, qui lutte contre tous les rapports de domination dont le racisme.
A ASSO-Solidaires, on milite pour faire face à la précarité des contrats évidemment mais aussi contre la marchandisation des associations. Début 2021, on a créé un groupe de travail sur l’antiracisme, notamment suite aux débats autour de la loi dite “séparatisme” car on sentait bien qu'il y avait une menace là sur les travailleur-ses eux mêmes. Très rapidement, on a écrit un communiqué sur cette loi. En tant que syndicat, il est important d’échanger sur les conséquences de cette loi, d’où cette table ronde. Nous avions d’abord échangé avec une avocate spécialisée avec qui nous allons d’ailleurs organiser une formation portant sur les discriminations religieuses, en particulier l’islamophobie au travail.
Il nous semblait donc important de parler aussi de cette loi avec des spécialistes qui sont ici présents.
Avant de leur laisser la parole, je voudrais commencer par contextualiser les mots qu'on va utiliser ce soir. Je vais d’abord me présenter : je m'appelle Houda Asal et je travaille dans le secteur associatif. Je suis syndicaliste à ASSO-Solidaires, militante et chercheuse sur les questions d'islamophobie. J'ai commencé à travailler sur ce sujet il y a dix ans. A l’époque, j'essayais d'analyser comment on allait définir ce concept et comment on pouvait aborder les débats à la fois avec des scientifiques, des militant-es, pour savoir comment ces mots étaient utilisés. Et à l'époque, il s'agissait d'un débat politique et d'un débat sémantique sur la définition de l'islamophobie, la dimension de la peur, le phénomène du racisme, la spécificité du religieux, etc. Les débats étaient très intéressants. La plupart de ces débats, notamment parmi les militan-es concerné-es et les sociologues, ont conclu que l'islamophobie est un racisme.
Le problème, c'est que depuis quelques années, il me semble qu'on n'est plus dans un débat sémantique. On est vraiment entré dans une guerre des mots, dans une guerre qui est faite contre l'usage de ce mot. Une guerre qui est faite à différents niveaux, y compris à partir des plus hautes instances de l’État, comme le montrent les débats récents autour de la loi séparatisme, qui viennent s'ajouter à tous les débats qu'on a eu par le passé sur l'islam, au moins depuis la loi de 2004 sur l'interdiction des signes religieux ostentatoires à l'école publique.
Ainsi, depuis 20 ans, avec tous les débats et les polémiques, on voit se développer une stigmatisation d'un groupe perçu comme musulman, avec des mots comme "intégrisme", “communautarisme”, “séparatiste”. Et avec la prolifération de ces mots, on a une multiplication de lois mais surtout de pratiques discriminatoires qui peuvent aussi être liberticides. Et je pense que c'est vraiment important parce que ce sont des discriminations quotidiennes que vivent les personnes musulmanes, les travailleuses et les travailleurs, et plus largement. Et il faut absolument pouvoir lutter contre.
Je disais qu'on est dans une guerre des mots qui est montée d'un cran. On a une gradation des attaques : tout l'espace militant qui lutte contre l'islamophobie est devenu suspect, toutes les personnes et les associations qui utilisent ce terme sont attaquées, disqualifiées et pourraient potentiellement être réprimées. Et donc, par exemple, on a une instance gouvernementale qui affirmait récemment, je cite : “C'est parce qu'il avait été accusé d'islamophobie que le professeur Samuel Paty a connu le sort tragique que nous connaissons. C'est donc avec lucidité que l'État refuse d'utiliser ce terme d'islamophobie qui n'est qu'une arme des islamistes contre les libertés et la rue”. Et donc on comprend bien qu'en utilisant ce mot, on devient des complices, éventuellement du terrorisme. On a quand même atteint un stade extrêmement fort de suspicion. Aujourd'hui, l'usage de ce mot a un coût et la lutte contre l'islamophobie a également un coût, évidemment et en premier lieu pour les musulmans eux-mêmes (ou les personnes perçues comme musulmanes, par ailleurs discriminées dans tous les secteurs de la vie). Mais cette lutte a aussi un coût pour les militant-es contre l'islamophobie, les chercheur-ses qui travaillent sur ces sujets, les individus qui se mobilisent, etc. Donc c'est vraiment important de comprendre que cette lutte, elle concerne tout le monde. Elle ne concerne pas que les personnes perçues comme musulmanes. Le racisme fait du mal à toute la société, c'est l'inégalité sociale et les violations des libertés publiques de manière générale, et des libertés fondamentales. Et rappelons ici que la liberté religieuse est une liberté fondamentale.
Donc, sans plus attendre, je vais présenter les intervenantes et les intervenants qui ont accepté notre invitation et que je remercie. Je vous précise juste que cette table ronde est enregistrée par Fréquence Paris Plurielle et que la période des questions ensuite ne sera pas enregistrée. L'objectif, c'est d'avoir un échange avec les intervenants et les intervenants et ensuite on ouvrira la salle.
Voilà donc je vais commencer par présenter Jawad Bachare, qui est militant pour les droits humains, qui est l'ancien directeur du CCIF, le Collectif contre l'islamophobie en France, qui a été dissout il y a maintenant un an, et qui, évidemment, a été un coup de massue pour le milieu associatif puisque c'est une association de défense des droits et contre les discriminations et qui luttait sur le terrain juridique, qui produisait des rapports statistiques. Il va revenir sur cette expérience de dissolution et fera l'état de l'islamophobie en France et les conséquences de cette loi séparatisme sur la lutte contre l'islamophobie.
Graziella Crocetti est secrétaire de Lallab, une association que vous allez re-présenter qui a aussi été entravée dans ses activités.
Ensuite Clara Gandin, avocate et membre membre du Syndicat des avocats de France. Mais aujourd'hui, elle n'intervient pas au nom du syndicat, mais en son propre nom. Elle va analyser les implications et les conséquences juridiques de la loi séparatisme. Concrètement, sur le terrain, elle reviendra sur la dissolution de deux associations.
Ensuite, nous aurons Julien Talpin, qui est sociologue, membre de la Coalition et l'Observatoire des libertés associatives. Il nous parlera de l'étude des conséquences et des implications de la loi séparatisme et du contrat d'engagement républicain sur les libertés.
Et puis enfin Elsa qui est membre du syndicat ASSO. Elle va parler de l'impact de la loi séparatisme et du contrat d'engagement républicain sur les conditions de travail des salarié-es, qui est évidemment notre préoccupation au syndicat.
Vous avez donc dix minutes chacun. Et puis, surtout, commencez à préparer vos questions dans la salle. Vous aurez deux petites minutes pour intervenir et on privilégiera dans la prise de parole, la parité et la parole des personnes concernées.
JAWAD BACHARE
L’association était une association de loi 1901. Sa mission principale était d’accompagner les personnes discriminées en raison de leur appartenance supposée à la religion musulmane. De manière plus concrète, en accompagnant au quotidien les personnes discriminées directement.
Dans le cadre de son travail, l’association assurait des activités de sensibilisation et même de communication par le biais des réseaux sociaux pour rendre compte de la réalité et sensibiliser l'opinion publique. Et dans le même temps, elle réalise également des partenariats avec des associations professionnelles en France et à l'international et diffuse un rapport annuel.
La suite à écouter en audio : réécouter l'audio de la soirée!