Fiche N° 17 – Le travail de nuit

Le recours au travail de nuit est en principe exceptionnel… et c’est tant mieux ! Il doit prendre en compte les impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleur·euse·s et être justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale. Il doit donc être mis en place dans des cas précis et sous certaines conditions. Le travail de nuit se situe entre 21 h et 6 h (ou dans la tranche horaire définie par un accord collectif applicable à l’entreprise). Pour être considéré·e comme travailleur·euse de nuit et bénéficier de différents droits et garanties, le/la salarié·e doit travailler avec une certaine régularité pendant ces périodes.


Qui est concerné·e ?

Tout·e salarié·e peut travailler la nuit. Seule exception : les jeunes de moins de 18 ans pour lesquels le travail de nuit est, en principe, interdit. Des mesures particulières de protection s’appliquent à la femme enceinte travaillant de nuit.

Quelle définition du travail de nuit ?

Est considéré·e comme travailleur·euse de nuit le/la salarié·e, qui accomplit pendant la période de nuit (21 h-06 h ou période fixée par accord) :

  • soit, selon son horaire de travail habituel, au minimum 3 heures de travail, à raison de deux fois par semaine au moins ;
  • soit un nombre minimal d’heures de travail pendant une période de référence, fixés par accord collectif étendu.

À défaut d’accord, le nombre minimal est de 270 heures accomplies pendant une période de 12 mois consécutifs. Une autre période de 9 heures consécutives, comprise entre 21 h et 7 h mais comprenant, en tout état de cause, l’intervalle compris entre 24 h et 5 h, peut être substituée à la période 21 h-06 h, par une convention ou un accord collectif étendu ou un accord d’entreprise ou d’établissement.

A défaut d’accord et lorsque les caractéristiques particulières de l’activité de l’entreprise le justifient, cette substitution peut être autorisée par l’inspection du travail après consultation de la représentation du personnel, si elle existe.

Par décret, dans certains secteurs d’activité, des dérogations peuvent être accordées pour des horaires spécifiques.

Le travail de nuit présente un certain nombre de spécificités, notamment en termes de conditions d’organisation et de garanties pour le/la travailleur·euse de nuit.

Quelle durée maximale du travail de nuit ?

La durée quotidienne de travail de nuit ne peut excéder 8 heures consécutives.

Néanmoins, il peut être dérogé à cette durée maximale, dans la limite de 12 heures :

  • par convention ou accord collectif de branche étendu ou d’entreprise ou d’établissement, qui peut prévoir une dérogation à la durée maximale de 8 heures pour les salarié·e·s exerçant les activités énumérées à l’article R.3122-9 du code du travail ;
  • lorsqu’il est fait application des dispositions des articles L.3132-16 au L.3132-19 du code du travail relatifs aux équipes de suppléance ;
  • en cas de circonstances exceptionnelles, sous réserve d’une autorisation de l’inspection du travail donnée après consultation des élu·e·s du personnel. Les salarié·e·s doivent bénéficier, dans les plus brefs délais, d’un repos d’une durée au moins équivalente au nombre d’heures effectuées en application de la dérogation. Ces circonstances sont définies comme étant étrangères à l’employeur, anormales ou imprévisibles, ou dues à des événements exceptionnels dont les conséquences ne pouvaient être évitées (intempéries, etc.).

La durée hebdomadaire de travail de nuit, calculée sur une période de 12 semaines consécutives, ne peut dépasser 40 heures.

Une convention ou un accord de branche étendu ou d’entreprise ou d’établissement peut porter cette limite à 44 heures, lorsque les caractéristiques propres à l’activité du secteur le justifient. À défaut de convention ou d’accord de branche étendu, un décret peut fixer la liste des secteurs pour lesquels cette durée est fixée entre 40 heures et 44 heures.

Dans quelles conditions s’exerce-t-il ?

Le recours au travail de nuit doit :

  • être exceptionnel ;
  • prendre en compte les impératifs de protection de la sécurité et de la santé des salarié·e·s ;
  • être justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale.

La mise en place du travail de nuit ou son extension à de nouvelles catégories de salarié·e·s doit être prévue par convention ou accord collectif de branche étendu ou par accord d’entreprise ou d’établissement.

Cet accord doit contenir :

  • les justifications du recours au travail de nuit ;
  • les contreparties sous forme de repos compensateur et, le cas échéant, de compensation salariale ;
  • les mesures destinées à améliorer les conditions de travail des salarié·e·s et à favoriser l’articulation entre activité nocturne et exercice de responsabilités familiales et sociales (moyens de transport…) ;
  • des dispositions propres à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment par l’accès à la formation ;
  • l’organisation des temps de pause.

A défaut d’accord, l’employeur peut demander l’autorisation à l’inspection du travail, à titre exceptionnel et sous certaines conditions, d’affecter des salarié·e·s sur des postes de nuit.

Tout travail entre 20 h et 6 h est interdit pour les enfants de moins de 16 ans, et entre 22 h et 6 h pour les jeunes de moins de 18 ans, qu’ils/elles soient salarié·e·s ou stagiaires. Des dérogations peuvent néanmoins être accordées pour certains secteurs.

Quels effets du travail de nuit sur la santé ?

Le ministère du Travail a identifié plusieurs conséquences, parfois très graves, sur la santé des salarié·e·s :

  • troubles du sommeil, fatigue, troubles de l’humeur, irritabilité ;
  • consommation plus élevée de médicaments pour faciliter le sommeil ou rester éveillé·e ;
  • troubles digestifs, déséquilibres nutritionnels ;
  • désadaptation et isolement social, professionnel, familial ;
  • risques cardiovasculaires accrus (surpoids, hypertension artérielle) ;
  • probabilité plus élevée de cancers ;
  • risque accru de prématurité et de fausses couches pour les femmes enceintes.

Quelles contreparties et garanties ?

Les contreparties doivent être données sous forme de repos compensateur et, le cas échéant, de compensation salariale. La convention ou l’accord collectif applicable à l’entreprise, où le travail de nuit est organisé, prévoient les mesures, destinées à compenser les contraintes du travail de nuit.

Par ailleurs, le/la travailleur·euse de nuit bénéficie de certaines garanties :

  • protection médicale particulière, sous forme d’une visite d’information et de prévention préalable à l’affectation à un poste de nuit et d’un suivi régulier librement fixé par le médecin du travail ;
  • possibilité d’être affecté·e temporairement ou définitivement sur un poste de jour, si son état de santé constaté par le médecin du travail l’exige. Ce nouveau poste doit correspondre à sa qualification et être aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé ;
  • protection contre le licenciement. L’employeur ne peut prononcer la rupture du contrat de travail du seul fait de l’inaptitude du/de la salarié·e à un poste de nuit, sauf s’il justifie par écrit de l’impossibilité de proposer un poste de jour en reclassement, ou du refus du/de la salarié·e d’accepter ce changement de poste.

La salariée enceinte travaillant de nuit doit être affectée (si elle le souhaite ou sur avis médical) à un poste de jour pendant la durée de sa grossesse. Le changement d’affectation n’entraîne aucune diminution de la rémunération.

Peut-on refuser le travail de nuit ?

En l’absence de dispositions contractuelles, le travail de nuit ne peut être imposé s’il est incompatible avec des obligations familiales impérieuses, notamment avec la garde d’un enfant ou la prise en charge d’une personne dépendante. Le/la salarié·e peut refuser d’accepter ce changement, lequel ne peut être considéré comme une faute ou un motif de licenciement.

En dehors de toute contrainte familiale, la jurisprudence considère le passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit comme une modification substantielle du contrat de travail. De ce fait, il ne peut être imposé au/à la salarié·e. Il en est ainsi même si le passage à un horaire de nuit est partiel.

De même, le passage d’un poste de nuit à un poste de jour constitue une modification essentielle du contrat soumis à l’accord du/de la salarié·e et ce, même si la modification n’est que partielle.